Préserver l’excellence de la biologie médicale face aux coups de rabot de l’Assurance maladie : une “équation impossible” pour le mouvement intersyndical des biologistes médicaux
La décision unilatérale de l’Assurance maladie de réduire drastiquement la cotation des actes de biologie médicale, que le Mouvement intersyndical dénonce, menace la pérennité de toute la filière de la biologie médicale, sans considération des conséquences pour les patients. En effet, cette décision va significativement affaiblir l’équilibre financier des acteurs du secteur, déjà fragile comme le souligne le rapport réalisé par le cabinet Roland Berger sur le secteur des laboratoires de biologie médicale libéral français[1], tout comme leur rôle majeur dans la prévention et l’accès aux soins.
Une empreinte majeure sur le système de santé : ce sont les conclusions du nouveau rapport que le cabinet Roland Berger a publié le 25 septembre. Il rappelle notamment que près de 500.000 patients sont pris en charge par les laboratoires de biologie médicale de ville quotidiennement.
Parmi ces patients, de nombreuses personnes sont ainsi touchées par des maladies chroniques ; leur diagnostic et leur suivi nécessitent des actes réguliers que les laboratoires de biologie médicale assurent, contribuant ainsi à soutenir la politique de prévention et d’accès aux soins souhaitée par les pouvoirs publics.
Les biologistes médicaux sont aussi acteurs de l’accès aux soins grâce à leur maillage territorial : aujourd’hui, près de 81% de la population française réside à moins de 7 kms d’un laboratoire de biologie médicale.
Le rapport publié par le Sénat[2] le même jour souligne quant à lui la disponibilité de l’offre, à 6,1 biologistes médicaux pour 100.000 habitants. Le chiffre est constant depuis 10 ans, témoignant du rôle majeur que les biologistes ont pris, à proximité des Françaises et des Français.
Mais le rapport pointe aussi la fragilité économique de la filière, source des préoccupations du Mouvement intersyndical :
- 77% des acteurs du secteur présente un résultat net négatif en 2023.
- Des baisses de tarifs de 9% en cumulé depuis 2023 et à nouveau 8,7% le 11 septembre 2024.
- Une inflation des coûts cumulée de 10% sur 4 ans.
« On voit clairement se dégager un effet ciseau important entre des tarifs en berne depuis plusieurs années et une inflation rampante qui augmente les coûts de fonctionnement des structures » clarifient les syndicats. « C’est toute la filière qui se retrouve affectée par cette équation impossible ».
En effet, le cabinet Roland Berger estime que jusqu'à 69% des 3.800 sites de prélèvement français, soit ~2.600 sites, pourraient être impactés dans leur fonctionnement, par des fermetures ou des réductions d’horaires.
A plus long-terme, cela pourrait signifier aussi une réduction des capacités des laboratoires, avec une diminution des horaires d’ouverture des laboratoires, des disparitions à prévoir aussi bien en zone rurale qu’en ville, en particulier pour les plus petits sites. De même, on pourrait avoir moins de plateaux techniques de proximité pour répondre à la demande médicale pour la prise en charge des patients, en particulier pour l’urgence. « La moitié des départements français pourrait être plus fortement impactée par des fermetures de sites, avec une baisse de l’accès au soin potentiellement sensible » énonce le rapport.
La biologie médicale d’urgence, pratiquée au sein des établissements de soins, comme les cliniques et les hôpitaux, est, elle aussi, particulièrement affectée par cet effet ciseau. Près d’un laboratoire d’urgence sur deux serait en danger, d’après le rapport Roland Berger, accélérant la réduction de la permanence de soins pour nos patients des services d’urgence ou hospitalisés.
« La recherche d’économies de 360 millions d’euros, en année pleine, de la CNAM complique encore davantage la situation et pose un risque important pour notre filière médicale, indispensable à tous les Français » regrette le Mouvement intersyndical, qui appelle par ailleurs l’Assurance maladie à revenir sur sa décision et à rouvrir un dialogue constructif.
[1] Cabinet Roland Berger, Étude du secteur des laboratoires de biologie médicale libérale français, Sept 2024
[2] Sénat, "Rapport d'information sur la financiarisation", 25 septembre 2024
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