Précisions sur les techniques de dépistage
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L’analyse PCR (amplification en chaine par polymérase) d’un prélèvement naso-pharyngé est la référence en matière diagnostique d’une infection aigüe. Il est parfois réalisé trop tardivement par rapport à l’apparition des symptômes mais ne manque pas de sensibilité à l’instant où il est pratiqué. Il peut rester également longtemps positif sans préjuger de la contagiosité.
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L’analyse PCR d’un prélèvement salivaire est moins sensible, de 10% environ suivant certaines études actuellement en cours [lire ici]. Sa place mérite encore d’être précisée.
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L’analyse par technologie LAMP (amplification isotherme médiée par les boucles) est une technique d’amplification des acides nucléiques viraux et détection par photométrie : cette technique diagnostique alternative du Covid-19 n’est actuellement pas remboursée par la Sécurité Sociale. Une étude de corrélation avec la technique PCR de référence montre une sensibilité de 73% [39%-94%] pour des CT < 35 [lire ici]. Malgré l’avantage d’une mise en œuvre plus aisée et rapide qu’une PCR classique, la technique LAMP n’est par conséquent en rien équivalente à la sensibilité d’une PCR prise comme technique de référence dans les études de corrélation, puisque dans 1 cas sur 3, elle manquera un diagnostic de positivité par PCR.
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La sérologie Covid-19, réalisée notamment sous forme de TROD dans certaines pharmacies, n’est pas un moyen de diagnostiquer une infection récente. Leurs performances, suivant le type de TROD utilisé, sont très variables, notamment sur le plan de la spécificité des IgM et toujours inférieures à celles disponibles dans les laboratoires de biologie médicale. Il est uniquement licite d’y faire recours si aucun laboratoire de biologie médicale n’est accessible afin de connaitre son statut immunitaire vis-à-vis du SARS Cov-2 (contact ancien ou absence d’anticorps détectable, ne préjugeant ni d’une protection ni d’une éventuelle contagiosité).
Point sur les difficultés des laboratoires de biologiemédicale pour organiser le dépistage dans certains cas
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Nous saluons l’effort mené pour autoriser une large catégorie de personnel à nous prêter main forte lors la phase du prélèvement. Néanmoins, il est utile de rappeler que le temps consacré au prélèvement naso-pharyngé ne représente qu’une infime partie du temps d’analyse complet : la phase administrative liée à l’enregistrement d’un dossier est beaucoup plus longue, la phase analytique en elle-même (« run » de 2 à 3H), de rendu, de validation biologique et de communication des résultats représente un continuum de temps qui se surajoute par ailleurs à l’activité ordinaire d’un laboratoire, qui ne peut être étendu sans moyens humains et matériels supplémentaires.
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L’acheminement du prélèvement naso-pharyngé jusqu’au plateau technique de biologie moléculaire est également un facteur limitant. En effet, certaines régions entières, notamment rurales, sont aujourd'hui dépourvues de ce type de plateau d’analyse en biologie moléculaire. Les laboratoires de ces régions doivent donc envoyer les prélèvements naso-pharyngés qu’ils réalisent à des plateaux distants de plusieurs centaines de kilomètre ou travaillent en collaboration avec les laboratoires départementaux ou vétérinaires les plus proches, ce qui peut allonger les délais de rendu des résultats.
Interrogations et alertes concernant la stratégie gouvernementale de dépistage
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La décision de mener des actions de dépistage à large échelle dans certains territoires, sans anticipation ni concertation avec les directions des laboratoires de biologie médicale concernée, a été responsable de situations sanitaires particulièrement difficiles à gérer qu’il convient de ne pas réitérer (saturation des standards téléphoniques, impossibilité de prendre en charge dans des délais courts les patients symptomatiques, délais de rendu important…).
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La décision d’autoriser les prélèvements PCR sans ordonnance risque de conduire à la même situation, notamment en cas de rebond épidémique, où la psychose risque de s’emparer de nombreux patients. Il nous aurait semblé plus judicieux de permettre aux biologistes médicaux de pouvoir jouer pleinement leur rôle de spécialiste en prescrivant une PCR diagnostique et en priorisant les patients aux signes les plus évocateurs de Covid-19. Sans préjuger d’une nécessaire montée en charge en nombre de test, cette hiérarchisation est malheureusement rendue nécessaire par les moyens matériels et humain par définition limitée avec un ratio rendement diagnostique le plus optimal possible, dans un contexte où les autres activités de biologie médicale, également essentielle au parcours de soin, ne peuvent être suspendues ou reportées.