Dans le cadre de l’épidémie actuelle, plusieurs examens de dépistage ont été développés : les examens virologiques en RT-PCR, d’une part et les examens sérologiques, d’autre part.
Les biologistes médicaux mettent en garde les autorités et le grand public sur les difficultés d’utilisation et sur la complexité de l’interprétation des résultats de ces tests sérologiques :
- Phase où les anticorps ne sont pas encore apparus et/ou n’apparaitront pas (faux négatifs)
- Interférences et réactions croisées (faux positifs, notamment sur les IgM en lien avec les facteurs rhumatoïdes)
- Incertitudes sur la durée de protection de ces anticorps et l’importance de ne pas lever les mesures barrières, que le test soit positif ou négatif.
- Possibilité de contagion, que les tests soient positifs ou négatifs.
- Difficultés de lecture et d’interprétation en fonction de l’intensité de la réaction colorimétrique
Un patient se croyant faussement protégé, du fait d’un manque d’information, d’une erreur d’utilisation ou d’interprétation pourrait être à l'origine d'un nouveau cluster.
Il est donc nécessaire que l’utilisation et l’interprétation de ces examens sérologiques soient réalisés par un expert du diagnostic.
De plus, la traçabilité des résultats sérologiques avec rédaction d’un compte rendu biologique, réalisation d’une sérothèque et transmission des résultats des examens sérologiques via la plateforme SIDEP est indispensable pour un suivi épidémiologique optimal. Tout cela n’est possible qu’en laboratoire de biologie médicale.
Enfin, aucun test de diagnostic rapide n’a été validé sur sang total et les performances n’ont pas été évaluées. Or la réalisation de TROD par les pharmaciens d’officine ne peut se faire que sur sang total recueilli par piqûre au bout du doigt et non sur sérum obtenu lors d’un prélèvement sanguin. Cela augmente les incertitudes quant à la qualité des résultats.
Dans son avis du 20 mai 2020, la HAS incite à la plus grande prudence dans le recours aux tests de diagnostic rapides (TDR) sous forme de TROD (utilisation en dehors d’un LBM). Elle affirme qu'un TROD ne peut se substituer aux examens de biologie médicale et qu'il serait recommandé de confirmer un résultat de TROD - positif ou négatif - dans un LBM. Dans ces conditions il n’est pas utile de réaliser des TROD en dehors du laboratoire puisque le résultat est moins fiable et ajoute une étape supplémentaire dans le parcours de soins du patient.
Quel serait l’intérêt pour la Santé publique d’autoriser les TROD ?
Les laboratoires de biologie privés et publics ont un excellent maillage territorial avec près de 5000 sites et sont capables de répondre à toutes les demandes de tests sérologiques. Avec l’aide des infirmières libérales, ils réalisent les prélèvements à domicile sur tout le territoire, même dans les zones médicalement sous-dotées et tous les français ont accès à un prélèvement sanguin, avec ou sans ordonnance.
Nous alertons le Ministre de la Santé sur les risques encourus et l’absence de sécurisation du résultat dans le cas d’une réalisation et interprétation de ces examens biologiques en dehors d’un LBM.
Après plus de quatre mois d’investissement et de sacrifices des biologistes médicaux dans la gestion de cette crise sanitaire, nous considérons comme un casus belli la sortie d’un arrêté permettant la réalisation de TROD sérologies par des non-professionnels du diagnostic.