S’appuyer sur la réforme
« En s’appuyant sur les orientations du Gouvernement pour la transformation de notre système de santé, nous devons trouver des possibilités de réorganisation de la profession et des examens de biologie médicale au plus près des patients, souhaite le Dr François Blanchecotte, président du SDB. Nous devons regarder comment il nous serait possible de participer plus directement à l’efficience et à la pertinence des soins en prenant part aux décisions médicales plus rapidement pour les patients et ainsi éviter des hospitalisations. Les niches d’économies réelles sont dans la prise en charge collective d’un patient : le biologiste médical y a toute sa place et nous détenons souvent l’information permettant d’optimiser ce parcours. » Mais aujourd’hui, du fait de la restructuration de la profession, la réalité est différente car les sites pré et post analytiques sont éloignés des plateaux techniques. « Cela influe sur les délais de réponses que le biologiste peut apporter aux autres professionnels de santé », explique le Dr François Blanchecotte.
Réinventer une nouvelle proximité avec les prescripteurs
Alors pourquoi ne pas envisager une nouvelle étape dans l’organisation de la biologie médicale ? Est-il possible pour cela de s’appuyer sur une biologie plus miniaturisée afin d’apporter une réponse biologique au médecin directement ? « Cette évolution requiert des modifications législatives car l’accréditation de ces petites machines de biologie médicale, actuellement utilisées dans des établissements, ne sont pas prises en charge en secteur libéral », souligne le Dr François Blanchecotte.
En attendant, il faut veiller à ce que les laboratoires de biologie médicale (LBM) intègrent en plus grand nombre les structures d’exercice pluridisciplinaires comme les Maisons de santé pluriprofessionnelles. « Au sein des MSP, il pourrait y avoir des techniciens et des biologistes, correspondants des LBM, qui pourraient ainsi participer aux staffs, à la coordination des soins, et à la prise en charge des patients en offrant une réponse de biologie de proximité, suggère le Docteur Blanchecotte. Je plaide pour la mise en place d’un circuit court. » La profession doit aussi profiter de la constitution des Equipes de soins primaires (ESP) et des Communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) pour se faire une place dans cette organisation des soins.
Accroître le rôle du biologiste
Parmi les autres pistes de réflexion : faire en sorte que le biologiste médical intervienne de façon plus régulière sur la prescription et le choix des examens afin d’écarter ou de remplacer ceux qui n’ont pas lieu d’être. « Il faudrait mettre en place des Rémunérations sur objectifs de santé publique (ROSP) pour les biologistes », propose le Dr François Blanchecotte. Et d’ajouter : « Je ne sais pas si les biologistes médicaux sont prêts pour toutes ces évolutions, mais si nous n’adoptons pas cette orientation médicale, et si demain nous ne faisons que du listing de chiffres pilotés par l’intelligence artificielle, quel va être notre avenir ? Pour garder un rôle de premier plan nous devons remplir ces missions de diagnostic médical, avoir un rôle dans le dépistage et la prévention. »
Développer le conseil et l’expertise
Cette évolution de l’exercice des biologistes est d’autant plus importante que les pratiques évoluent : les patients ont en effet de plus en plus accès à des autotests qui les éloignent des LBM. « Une biologie médicale à deux vitesses se développe entre, d’une part, des tests effectués par les biologistes médicaux sur des machines de très grande qualité et, d’autre part, des autotests qui ne sont pas nécessairement effectués dans de bonnes conditions », rapporte Alain Suiro, ex-responsable national Bio Qualité. Selon lui, les biologistes doivent œuvrer pour que tout autotest affichant un résultat positif soit complété par une vérification en LBM, « car il ne faudrait pas qu’un traitement soit prescrit par un professionnel de santé uniquement sur la base de ce type de test », prévient-il.
Certains autotests ou home tests sont effectués par le patient sur prescription médicale, comme la recherche du taux de glycémie avant l'injection d'insuline. Normalement, un règlement oblige les LBM à contrôler les lecteurs de glycémie des patients une fois par an, afin de s’assurer de la conformité des résultats en les comparant à ceux pouvant être effectués par un laboratoire. « Cette vérification n’est pas faite car elle n’est pas prévue financièrement, souligne Alain Suiro. Nous devrions pourtant nous battre pour la réaliser car cela relève de notre rôle de conseil. » Et de regretter : « Plus la technique se rapproche du patient, plus ce dernier s’éloigne de nous. Le biologiste médical va perdre tout ce qui relève des examens simples. C’est l’évolution. Face à cette modification de notre exercice, nous devons garder notre expertise et trouver des pistes pour en faire bénéficier les patients et le système de santé. »